Copies, pastiches, faux
Jacqueline Lichtenstein
Professeur émérite d’esthétique et de philosophie de l’art, université Paris-Sorbonne
Jacqueline Lichtenstein est professeur émérite de philosophie de l’art à l’université Paris-Sorbonne et a également enseigné aux Etats Unis. Elle est l’auteur de plusieurs ouvrages consacrés à la théorie de l’art : La couleur éloquente, Flammarion, coll. “Champs”, 1989, La tache aveugle, Paris, Gallimard, coll. “essais” en 2003, Les raisons de l’art, Paris, Gallimard, 2014, coll. « Essais », Avec Mr Christian Michel, professeur d’histoire de l’art, elle a dirigé l’édition complète, scientifique et critique des Conférences de L’Académie Royale de Peinture et de sculpture, 11 vol., Paris, Ecole nationale supérieure des beaux-arts, 2008-2016
Copie, réplique, citation, pastiche, faux, toutes ces catégories renvoient à une pratique qui a longtemps été centrale dans la formation de l’artiste : celle de l’imitation. Or les frontières séparant une pratique légitime comme celle de la copie et une pratique illégitime comme celle qui consiste à fabriquer un faux ont toujours été mouvantes ; elles ont considérablement fluctué au cours de l’histoire, en fonction de la définition de l’art et, notamment depuis le XXème siècle, du marché de l’art. Si les faux ont toujours existé, ils n’ont pas toujours fait l’objet d’une condamnation morale et encore moins, comme aujourd’hui, d’une criminalisation. En même temps, tout un pan de l’art contemporain joue aujourd’hui à brouiller complètement les frontières séparant le faux de la copie ou du pastiche, s’efforçant de mettre en cause une définition de l’art fondée sur l’idée d’originalité et d’unicité. Qu’elles soient légitimes ou illégitimes, ces pratiques artistiques, surtout quand on les considère dans une perspective historique, questionnent aussi bien notre idée de l’art que notre conception du jugement esthétique. Elles obligent à nous interroger sur la manière dont nous jugeons une oeuvre d’art.